André Breton, chronologie numérique, 4
par Henri Béhar, le 21 juillet 2023
CHRONOLOGIE NUMÉRIQUEAndré Breton, chronologie numérique, 4
1922-1924
1922
1922-1924 Littérature, nouvelle série, n° 1 à 13.
Janvier, installation du couple Breton au 42, rue Fontaine.
3 janvier : appel d’AB pour le Congrès de Paris.
Février : projet de bibliothèque de J. Doucet, AB avec Aragon : (OC I, 631-36).
1er mars : Littérature, nouvelle série, n°1. (texte numérisé). Directeurs : AB et Philippe Soupault. Administration Au Sans Pareil.
Contributions AB : « Récit de trois rêves » ; « André Gide nous parle de ses Morceaux choisis » ; « Interview du professeur Freud à Vienne ». « L’Esprit nouveau ». Reproduction du Cerveau de l’enfant de Chirico, toile qui restera au-dessus de son bureau jusqu’en 1956.
2 mars : AB : « Après Dada », Comoedia, n° 3364.
30 mars : Échec du « Congrès pour la détermination des directives et la défense de l’Esprit moderne », dit « Congrès de Paris » suscité par AB aux artistes novateurs et aux directeurs de revues : R. Delaunay, F. Léger, A. Ozenfant, J. Paulhan pour la NRF, AB pour Littérature, R. Vitrac pour Aventure. « Le Congrès de Paris est foutu, Francis Picabia en fait partie » déclare Picabia. Invité pour Dada, T. Tzara se récuse. Voir dossier coupures de presse : http://ark.bnf.fr/ark:/12148/cb38736782v
1er avril : Littérature, n.s., n° 2. AB : « Lâchez tout » : AB quitte Dada.
Avril : T. Tzara publie Le Cœur à barbe 4 p. en réponse à AB.
6 mai : AB, Fraenkel, Rigaut à la Foire du Trône.
9 mai, conseillé par AB, J. Doucet achète La Charmeuse de serpents du Douanier Rousseau (50 000 FF), à Robert Delaunay, sous réserve qu’à sa mort le tableau ira au Louvre.
21 mai : réponse de AB à l’enquête du Figaro : « La poésie écrite perd de jour en jour sa raison d’être » (OC I, 267)
4 juillet : 3e vente Kahnweiler, se procure un Léger et trois Braque.
12 août : AB à Lorient, chez ses parents. Développe pour Doucet ce qu’il entend par « esprit nouveau », et se tourne vers Marcel Duchamp.
Septembre-novembre : Période des sommeils provoqués (inspirés de la technique des médiums, sans leurs présupposés), à l’initiative de R. Crevel, qui se livre à la 1re séance devant témoins. Une phrase revient constamment : « On vend à l’encan les robes de la princesse de Lamballe, mais on ne vend pas ses chapeaux ».
Relation de l’événement par AB dans « Entrée des médiums », (Littérature, n° 6, nov. 1922). Voir dossier Archives AB, lot 2 026.
AB consigne un dialogue entre B. Péret et Crevel dans « Comme il fait beau ! » (OC I, 439).
1er septembre : à partir de cette date, G. Gallimard prend en charge l’édition de Littérature dirigé par AB seul (et le soutien financier de Doucet).
1er septembre : AB : « Clairement », Littérature, n.s., n° 4.
27 octobre : AB à J. Rivière : « l’intérêt de ces séances… ne va pas croissant, au contraire ». Sollicité depuis le début du mois, Man Ray photographie Desnos en plein sommeil provoqué. Voir la sténographie intégrale de la séance.
29 octobre : Mussolini prend le pouvoir à Rome.
30 octobre : Picabia conduit AB à Barcelone dans sa voiture , avec Germaine Everling et Simone.
Étape à Marseille : visite de l’Exposition coloniale. « le plus triste jardin zoologique de ma connaissance », dit Breton. Voir : « Souvenirs de voyage : l’exposition coloniale de Marseille », Littérature, n. s. n° 8, 1er janvier 1923, pp. 3-4
Exposition de Picabia Galerie Dalmau, 18 octobre-8 décembre 1922, catalogue préfacé par AB.
2 novembre : AB envoie une carte postale de La Sagrada familia, de Gaudi, à Picasso : « Connaissez-vous cette merveille ? »
17 novembre : à l’Ateneo de Barcelone, Conférence AB : « Caractères de l’évolution moderne et ce qui en participe ». « Il n’y a qu’une chose qui puisse nous permettre de sortir, momentanément au moins, de cette affreuse cage dans laquelle nous nous débattons et ce quelque chose c’est la révolution, une révolution quelconque, aussi sanglante qu’on voudra, que j’appelle encore aujourd’hui de toutes mes forces. » (OC I, 305)
1er décembre : AB propose à différents artistes (Brancusi, Cendrars, Picasso) d’organiser un nouveau salon, dans le prolongement de sa conférence. Échec.
1er décembre : « Les mots sans rides », Littérature, n°6, à propos des jeux verbaux de Marcel Duchamp : « Et qu’on comprenne bien que nous disons : jeux de mots quand ce sont nos plus sûres raisons d’être qui sont en jeu. Les mots, du reste, ont fini de jouer. Les mots font l’amour. » (OC I, 286)
11 décembre : intervention d’AB et ses amis à la représentation de Locus Solus de Raymond Roussel, adaptation de Pierre Frondaie, sifflée par les invités au théâtre Antoine lors de sa création (le 8 décembre). Le lendemain, AB fait remettre un exemplaire des Champs magnétiques à l’auteur, ainsi dédicacé : « À Raymond Roussel pour Locus Solus, le seul spectacle auquel il m’ait été donné d’assister. »
1923
15 février : mise en vente de Littérature, n° 9, sous la seule responsabilité d’AB désormais.
18 février : AB : « La Confession dédaigneuse » La Vie moderne, XLVe année, n° 6, n° 7 (25 février 1923) ; n° 8 (4‑11 mars 1923) et dans les numéros des 18 et 25 mars. OC I, 1222).
28 mars : AB signe un contrat avec Gaston Gallimard pour la publication d’un recueil d’articles, Les Pas perdus.
4 avril : J. Rivière déclare à AB qu’il fera désormais le silence sur ses activités.
7 avril : « André Breton n’écrira plus », interview par Roger Vitrac dans Le Journal du peuple. Desnos prend la même décision. Duchamp qui, dans le même temps, abandonne son Grand Verre.
14 avril : « Tristan Tzara va cultiver ses vices », interview par Roger Vitrac, Le Journal du peuple.
6-7 mai : 4e et dernière vente Kahnweiler AB, Desnos, Éluard et où seront bradés nombre de papiers collés de Braque et de Picasso.
3 mai : AB rompt avec Picabia et lui fait connaître ses réserves.
4 mai : Aragon, Breton, Morise et Vitrac imaginent de parcourir la France à pied, durant une dizaine de jours, en dormant à la belle étoile, et de voir ce qui en ressortirait, sur tous les plans. Le tirage au sort les fait partir de Blois, pour parcourir la Sologne, ses marais, ses sables insalubres, etc. à la gare d’Argent, Morise s’attaque à un christ qui n’avait rien à y faire. Au cours de la marche, Aragon et Vitrac se chamaillent. Ce dernier à évoqué l’expérience sous le titre de « voyage magique », de caractère initiatique. Déambulation écourtée, décevante sur le plan formel, d’où naquirent pourtant de beaux textes automatiques, où les femmes, absentes du quatuor, sont très présentes.
15 mai : élection du « cartel des gauches ».
15 mai : recréation de L’Étoile au front de Raymond Roussel. Réplique de Desnos : « Nous sommes la claque et vous êtes la joue ».
20 juin : G. Gallimard présente son compte à AB. Il lui doit 3.000 FF pour Littérature (3 415,16 Euros en 2022 ), qui n’a que 20 abonnés ; les libraires refusent d’en prendre le dépôt, etc. AB décide de publier sa revue sous forme de numéros spéciaux. Gallimard accepte de poursuivre sa gestion.
6 juillet : Soirée du Cœur à barbe, organisée au Théâtre Michel par le groupe Tcherez. Sabotage par AB et ses amis, au prétexte que la pièce de Tzara a déjà été jouée. En 1re partie ; Pierre de Massot vient déclamer une provocante litanie des morts. AB s’insurge, monte sur la scène et le frappe de sa canne, lui cassant le bras. Chahut.
14 août : AB prend son congé d’été. Séjourne à Lorient avec Simone.
22 août : AB compose une vingtaine de poèmes dont il se déclare satisfait (lettre à J. Doucet, (OC I, 1 185)
Visite surprise à Lorient d’Éluard et Marcel Noll.
7 septembre : AB et Simone se rendent au manoir de Camaret pour rencontrer le poète Saint-Pol Roux, qui les accueille chaleureusement. Il offre Anciennetés, accompagné de cette dédicace : « À André Breton “le verbe doit parler autrement et dire autre chose”, en souvenir de sa visite et de celle d’enchantement de sa jeune dame, Saint-Pol Roux, manoir de Coecilian, 7 septembre 1927 » (7 au lieu de 3) Le recueil Clair de terre lui est dédié.
9 octobre : Picasso lui offre son portrait qui figurera dans le recueil Clair de Terre, publié à compte d’auteur par AB, achevé d’ipmrimer le 15 nov.
14 octobre : AB à Valvins pour hommage à Mallarmé.
20 octobre : Les Feuilles Libres publient un inédit de Rimbaud, « Poison perdu ». AB dénonce aussitôt le faux.
11 novembre : AB n’apprécie pas la maison d’Eluard à Eaubonne : « La décoration de Max Ernst dépasse en horreur tout ce qu’on peut imaginer. On se prend à regretter Boucher, à quoi rêvent les jeunes filles, les petits Saxes. » (Lettre à Simone)
8-24 décembre : Procès aux assises de Germaine Berton (1902-1942). Ouvrière, anarchiste libertaire. Elle est jugée pour l’assassinat, le 22 janvier 1923, de Marius Plateau, membre de l’Action française et chef des Camelots du Roi. Simple accident du travail, ironise Aragon. AB déclare :« l’opinion de Germaine Berton est infiniment plus considérable que celle de Monsieur Gide ».
Voir le portrait sur le site André Breton
À l’issue de son procès, AB et ses amis Aragon et Max Morise lui portent une corbeille de roses rouges avec ces mots : « À Germaine Berton, qui a fait ce que nous n’avons pas su faire. » (lettre de Simone à Denise, 24 décembre 1923).
1924
28 janvier : AB à Félix Fénéon :« Je vous dois un très grand plaisir, qui a fait l’enchantement de toute une journée. Est-ce à la révélation de Seurat, est-ce à votre charmant accueil et à celui de Mme Fénéon que j’ai éprouvé le plus de joie – je ne saurais le dire, mais je me promets bien, si vous n’y voyez pas d’inconvénient, de ne pas en rester là avec vous. »
1er février 1924 : « La confession dédaigneuse », [extrait], Paris-Journal.
5 février 1924 : AB : Les Pas perdus, essais 1918-1923. Paris, Gallimard, coll. Documents bleus, 212 p.
Voir le document sur le site André Breton
Mars : la librairie Gallimard, Bd Raspail, consacre une vitrine à : Les Pas perdus, avec les ouvrages auxquels il est fait référence, de pages manuscrites, etc.
8 mars : Simone absente, Desnos dîne chez AB, puis ils se livrent à des exercices d’écriture et notent « la voix qui se cache après avoir parlé et qui se tait et qui abuse ».
24 mars, Éluard disparaît. Le lendemain, son recueil Mourir de ne pas mourir paraît avec cet exergue « Pour tout simplifier je dédie mon dernier livre à André Breton ». Celui-ci est très affecté. Il écrit : « Quel est‑il ? Où va‑t‑il ? Qu’est‑il devenu ? […] N’a‑t‑il pas suivi le chemin qui se perd dans les cerveaux de l’idée, ne faisait‑il pas partie du glouglou de la bouteille de la mort ? » (OC I, 381).
Éluard fera un long voyage autour du monde, et sera de retour en octobre, au Cyrano, comme si de rien n’était.
18 avril : AB rédige une définition du surréalisme qui ne doit rien à Apollinaire.
17 juin : AB informe Simone qu’il projette d’écrire un manifeste avec Aragon et Soupault ; pour définir leur conception du surréalisme.
Fin juin : AB achève sa présentation de Poisson soluble : C’est vivre et cesser de vivre qui sont des solutions imaginaires. L’existence est ailleurs. » (OC I, 346)
Juillet : AB et Simone en vacances à Lorient. Rencontre des amis éparpillés en Bretagne. AB transforme sa préface en Manifeste du surréalisme.
13 juillet : AB et Simone viennent en aide à Clara Malraux, dont le mari est condamné à la prison pour vol de pièces sacrées en Indochine.
22 juillet : AB vient au secours de Limbour , impliqué dans un incident à Mayence.
3 octobre : AB fait la connaissance d’André Masson en son atelier. Amitié décisive.
3 octobre : Antonin Artaud refuse de se lier à un groupe, quel qu’il soit, mais il accepte de rencontrer les futurs surréalistes au café Cyrano, « beau comme une vague, émouvant comme une catastrophe », dit de lui Simone ».
7 octobre : retour d’Éluard : « « Alors, il m’a mis un petit mot, qu’il m’attendait hier à Cyrano, ni plus ni moins. / C’est bien le même, à n’en pas douter. / Des vacances, quoi. » AB à Marcel Noll.
10 octobre : décision de fonder une revue, La Révolution surréaliste, dirigée par Pierre Naville et Benjamin Péret (1924-1925) pour les numéros 1 à 3.
Manifeste du surréalisme et fiche pédagogique sur le surréalisme
10 octobre : ouverture du Bureau de recherches surréalistes, 15 rue de Grenelle. Dirigé par Francis Gérard puis Antonin Artaud.
Le Bureau est ouvert chaque après-midi à tout public. Un registre consigne l’activité.
Voir les Archives du Cahier du Bureau des Recherches surréalistes paru en 1988, présentées et annotées par Paule Thévenin.
11 octobre : Maurice Martin du Gard : « André Breton », Les Nouvelles littéraires. Compte rendu du Manifeste du surréalisme lu sur épreuves.
Voir le document sur le site André Breton
15 octobre : Manifeste du surréalisme, Poisson soluble. Paris, éd. Du Sagittaire chez Simon Kra, 1924, 194 p.
Parmi bien d’autres, un envoi de l’auteur à un grand penseur : « à Henri Bergson, / très humble hommage / d’admiration / André Breton / 42 rue Fontaine Paris IXe »
18 octobre 1924 : Un Cadavre, pamphlet après la mort d’Anatole France ; Aragon et Breton renvoyés par Jacques Doucet (qui ne se séparera d’eux que progressivement).
8 novembre 1924 : AB propose à Jacques Doucet d’élaborer une bibliographie de sa collection littéraire pour en déterminer la valeur bibliophilique.
3 décembre : AB, Aragon, Naville à l’imprimerie où sort La Révolution surréaliste.
12 décembre 1924 : J. Doucet acquiert enfin Les Demoiselles d’Avigon. AB le félicite : « Pour moi c’est un symbole pur, comme le tableau chaldéen, une projection intense de cet idéal moderne que nous n’arrivons à saisir que par bribes » (Lettres).