MÉLUSINE

La fée verte ou l’absinthe de tout bouquet

PUBLICATIONS DIVERSES

« La fée verte ou l’absinthe de tout bouquet » dans : Arlette Bouloumié, Écriture et maladie, Imago, 2002, pp. 39-55.

Cette notice en deux parties donne à lire mes travaux sur l’absinthe comme motif poétique et surtout comme plante dangereuse pour la santé. Je raconte comment l’intérêt pour « la fée verte », autrement dit « l’herbe sainte » m’est venu par l’intermédiaire d’un de mes étudiants originaire du Val-Travers (en Suisse) où se trouve désormais un musée. Mais c’est à Auvers-sur-Oise, à l’auberge où Van Gogh vécut ses derniers jours, que j’ai tout d’abord goûté à la boisson, bien avant que sa consommation ne fût officiellement autorisée en France, en 1988. Au-delà de l’anecdote, l’absinthe demeure un thème très important dans la littérature française moderne et contemporaine, ce dont on pourra juger ci-après.

Visiter : Musée de l’absinthe

I. Colloque d’Angers, 2001

Arlette Bouloumié, Écriture et maladie, Paris, Imago, 2002, 352 p. Nietzsche et la folie, Dostoïevski et l'épilepsie, Thomas Mann et la tuberculose, Baudelaire et la syphilis, ou plus près de nous, Hervé Guibert et le sida. On associe souvent les noms de grands écrivains au mal qui les rongeait, tant il est vrai que le génie semble entretenir un rapport mystérieux avec la destruction du corps. S'appuyant sur des exemples du XIXe et du XXe siècle, cet ouvrage montre la façon dont nombre de créateurs firent face à la maladie par l'écriture, y puisant une source d'inspiration ou l'affrontant à travers les mots. Ce captivant ensemble de cas met en lumière la confrontation du langage et de la douleur indicible, du verbe et des forces de mort, plaçant ainsi la recherche du sens de la souffrance au cœur même de la littérature.

TABLE DES MATIÈRES Préface : Michel TOURNIER, La santé, l’âme et le corps, p. 7 Introduction : Arlette BOUlOUMIÉ, p. 11 Cyr VOISIN : Destin des maladies et littérature, L’exemple de la tuberculose, p. 15 Thierry ORFILA : L’image de la maladie chez Baudelaire 25 Henri BEHAR ! La fée verte ou l’absinthe de tout bouquet, p. 39 Iemie VAN DER PŒL : Entre Satan et Charcot : l’imaginaire de l’hystérie chez J.-K. Huysmans, p. 56 Pierre MICHEl : Octave Mirbeau et l’hystérie, p. 71 Alain NÉRY : Corps malade et aimant dans le Carillonneur de Rodenbach, p. 85 Marc KOBER : Du bon usage du voir médical à l’ouverture de Vénus, p. 93 Michael WORTON : Narration, dialogue et diagnostic : le cas Alphonse Daudet, p. 107 Anne-Cécile POTTIER-THOBY : Le mal à dire : Julien Green syphilophobe, p. 120 Claude HERZFElD : Graal et phtisie dans la montagne magique, p. 139 Jacques LEMARINEL : La maladie comme parcours initiatique dans Siloé, de Paul Gadenne, p. 152 Chiwaki SHINODA : Éclat aveuglant de la mort, à la dernière vision des poètes malades, Kajii et d’autres, p. 164 Bruno BlANCKEMAN : Mourir au texte : sur quelques récits d’Hervé Guibert, p. 178 Claude FOUCART : Harold Brodkey face au sida, un radeau désamarré, p. 186 Francis BERTHElOT : Symptôme, Symbole et stratégie, p. 198 Juliette ROGERS : Monstres médicaux : femmes médecins dans la littérature du début du XXe siècle, p. Isabelle MEURET : Écriture faminine : trouble du comportement littéraire, p. 219 Bruno FABRE : L’image de la maladie dans les contes de Marcel Schwob : De la terreur à la pitié, p. 231 Olivier PENOT-LACASSAGNE : Artaud : la peste, p. 242 Joseph GARREAU : L’inscription de la maladie chez Catherine Pozzi « Par la plume danse la liberté », p. 253 Carmen BOUSTANI : Rhétorique de la folie et de la création de mrs Dalloway aux vagues de Virginia Woolf, p. 264 Arlette BOULOUMIE : L’épilepsie dans l’œuvre de Dostoïevski, p. 277 Lucien GUIRINGER : Au risque de la folie, la révélation nietzschéenne de la sagesse du corps, p. 288 Jean-Marie PAUL : Schopenhauer : la maladie du vouloir-vivre, p. 297 Philippe WALTER : Hector Berlioz et la mélancolie, ou l’esthétique du pathologique, p. 311 Jean ARROUYE : Usages picturaux de la maladie, p. 322 Pour conclure Georges CESBRON, p. 333

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II. Colloque Paris 2012

Images du colloque

ALCOOLS XVIème Colloque des Invalides

16 novembre 2012 9h Accueil des participants 9h15 Marie-Claude Delahaye : L’absinthe à l’affiche Henri Béhar : La fée verte ou l’absinthe de tout bouquet Denis Saint-Amand : La vie alcoolique du Zutisme Jean-Paul Morel : Chansons toxiques Alain Chevrier : Monochromies absinthiques Yves Thomas : Palais cultivé à l’heure de l’absinthe Alain Weil : Avez-vous déjà bu du vespetro, mesdames ? Elisabeth Chamontin : L’alcool de la comtesse 10h 15 Pause-café Olivier Justafré : Vers d’alcool Philippe Di Folco : La vérité est-elle soluble dans l’alcool ? Eric Marty : Rimbaud. La comédie de la soif Marc Décimo : Halte à l’alambic et à la cocotte-minute ! Bruno Fuligni : Le député Morlot, héros du champagne picard à la commission des Boissons Daniel Ridge : Le fétichisme du cocktail chez quelques littérateurs Mathieu Lecoutre : Les Inspirés de la gourde Daniel Zinszner : Exercice trouvé dans une bouteille 12h – 14h Déjeuner 14h Benoit Noël : De Wynona Ryder à Dita von Teese David Christoffel : Il faut le boire pour le croire Daniel Bougnoux : Oralités Alain Zalmanski : Centons et buvons Pascal Durand : Un dernier Pœ Julien Schuh : Jarry était-il un « alcoholique » ? Marc Zammit : Racine était-il alcoolique ? Christophe Bourseiller : Carlos Castaneda, quand la drogue complète l’alcool Clément Carbonnier : Le bouilleur et le percepteur Anouck Cape : Le dernier stade de la soif Aude Fauvel : Poétiques alcoolisées et spiritueux psychiatriques Jacques Noizet : Hic et hoc 15h 15 Pause-café Daniel Aranjo : Vodka et littérature russe Martine Lavaud : Sous l’objectif : l’écrivain boit Denis Mellier : John Ford : grande gueule et gueule de bois Paul Schneebeli : La Mélancolie du dypsomane Jean-Pierre Lassalle : Alcools surréalistes Marc Dachy : Bar Nicanor Dominique Noguez : Santés ! Christian Biet : Buveurs de sang 16h : Table-ronde et débat

Publication :

Colloque des Invalides (16 ; 2012 Alcools: seizième Colloque des Invalides, 16 novembre 2012 / textes réunis par Jean-Jacques Lefrère et Michel Pierssens, usson : du Lérot, 2013, vol. 270 p. ill. en noir et en coul., ll. En marge.

Mon intervention ci-dessous: Colloque des Invalides, 16 novembre 2012

« l’herbe sainte » ou L’absinthe de tout bouquet L’annonce de ce colloque s’illustrant d’une buveuse d’absinthe, je ne pouvais manquer de prendre une option. Or, dans ma hâte à répondre aux organisateurs, j’avais repris le titre d’une intervention faite naguère au colloque d’Angers sur les maladies, recueillie dans La Littérature et son golem II. Il n’est évidemment pas question de reprendre ici des propos déjà tenus dans une autre enceinte. C’est pourquoi je modifie mon titre et parlerai désormais de « l’herbe sainte », associant dans le même bouquet deux poètes qui ont su s’apprécier, Jarry et Mallarmé. Aujourd’hui, je me propose de reprendre une base de données que j’avais alors constituée à partir des occurrences du terme dans le TLF, de 1600 à nos jours. Le vocable se trouve surtout concentré au XIXe et au XXe siècle, dans la mesure où il désigne la boisson alcoolisée, répandue par une firme de Pontarlier à partir de 1805, jusqu’à son interdiction par une loi du 16 mars 1915. Cela m’avait conduit à « lire » environ 200 cents textes littéraires, et à ranger les différents emplois en deux grandes catégories, selon qu’ils désignaient la plante ou la liqueur, et, à l’intérieur de ces deux classes, leur emploi spécifique. Traitement Frantext Dans 274 ouvrages de langue française (aujourd’hui, Frantext indique 598 occ. chez 162 auteurs).

Classement des occurrences selon caractéristique d’emploi :

I. La plante De 1773 à 1994, les auteurs traitent de la plante, qu’ils identifient par trois traits principaux : amertume/odeur/couleur par son amertume d’abord (signalée dans la Bible). Le terme sert de support à des images autour de la tristesse et du malheur, notamment dans le discours poétique, depuis 1606 (Bertaux) jusqu’à 1941 (Aragon, Le Crève-cœur). Mais elle est aussi remarquable par son odeur, qu’elle soit à l’état naturel, dans des terres arides, ou distillée et servie à la table des bistros. Enfin, elle est identifiée par sa couleur si caractéristique qu’on l’a dénommée « la fée verte ». Ce trait étant noté par les conteurs (Vathek) et les poètes (Tzara) aussi bien que par les romanciers (Montherlant, Cendrars, Modiano, Claude Simon), bien longtemps après sa disparition officielle. L’absinthe est employée sous des formes diverses Extrait, décoction, vin, en cataplasme, injection, lavement Extrait (chez J.-J. Rousseau), vin (Mirabeau, Augustin Thierry), enfin comme décoction, que ce soit en cataplasme, injection, ou même lavement. Double usage : remède, boisson a) comme remède (Hugo, Goncourt, Huysmans, jusqu’à Jacques Lanzmann) Et même comme anesthésiant ! b) comme boisson, elle envahit le roman, bien sûr, mais aussi le journal intime et l’essai.

II. Alcool Puisque le thème de cette journée est l’alcool, je focaliserai votre attention sur son Rituel  Élaboration si particulière pour un apéritif devenu à la mode après la conquête de l’Algérie (où l’élixir faisait partie du paquetage des soldats), donnant lieu à un rituel spécifique que les romanciers décrivent et commentent : « Vous avez votre absinthe. Il s’agit de la faire. Ce n’est pas, croyez-moi, comme pense un vain peuple, une petite affaire, il ne faut pas avoir ailleurs l’âme occupée. Premier point. Maintenant, exigez tout d’abord de la belle eau frappée, toute autre dédaignant. D’eau tiède, il n’en faut pas. Jupiter la condamne, et même au pis aller. Autant vaudrait la " battre " avec du pissat d’âne... révérence parler. » Raoul PONCHON, La Muse au cabaret, 1920, p. 198, L'INVALIDE à LA GUEULE DE BOIS.