IMMORTELLE MALADIE, 1924 1 Sur la colline qui n’était inspirée que par les lèvres peintes les yeux blancs s’ouvrent à la lumière de la fête et la respiration va mourir de sa belle mort On dirait qu’une main se pose sur l’autre versant de la colline et que les hommes crient C’était du ciel de Dieu que tombaient les paroles absurdes Maintenant partons pour la maison des algues où nous verrons les éléments couverts par leur ombre s’avancer comme des criminels pour détruire le passager de demain ô mon amie ma chère peur 2 Où est-il Parmi les étoiles accroupies ou les minéraux inconnus qui flambent dans les corolles des fleurs fatales Si je rêvais je pourrais répondre Il descend du bec de la colombe ou bien Il monte les escaliers de neige qui conduisent aux roches soupirantes les grands escaliers bénévoles où vivent les poètes en caoutchouc
3 Le doigt dans l’eau les chanteurs aimant chanter ont l’air d’une fleur fanée Fleur fanée CŒUR aimé dit l’autre Mais toi poussière de charbon tu n’es pas aimée et tu t’envoles vers le soleil Nous grandissons dans le bruit des coups de pioche Que fait-on à la terre Le supplice commence avec le passage de la jeune fille aux oranges qui passe près de nous tous aspire l’air à pleins poumons et pleure parce qu’il faut pleurer sans mesure Pleure jeune fille aux oranges tu connaîtras l’amour des cordes de pendu tu connaîtras l’amour et la caresse des plumes
4 Courir sur un miroir comme un aveugle et chanter dans l’oreille des dieux voilà mes désirs aujourd’hui Mais le vent aura chassé les êtres de leur élément naturel avant que je passe dans l’avenue plantée de moribonds qu’un souffle salé ferait renaître et qu’un cri de paon ferait mourir. Si je passais ils resteraient éternellement moribonds c’est pourquoi il faut que je défile devant eux avec mon ombre Faute de quoi le meilleur de moi-même ne sera plus que l’insaisissable soupir d’un animal que j’ai rêvé dans ma jeunesse
5 Montrez-moi le savant amoureux de la femme-cyclope que j’en fasse mon égal Après pourra venir l’ère des fleurs galantes des squelettes patriotiques et des catastrophes sans importance je m’en fous J’irai près des pyramides qui ne sont que des colliers de martyrs destinés à disparaître avec leurs propriétaires et le souvenir de leurs ridicules et je danserai devant ces fameuses pyramides jusqu’à ce qu’elles disparaissent
6 Il s’agit de la pluie qui a mouillé les os les plus rebelles La pluie des os atteindra un jour les oreilles nocturnes et l’on saura ainsi que se prépare la mue des fruits leur départ sur les ailes des monstres aux yeux de quartz qui pleurent devant le soleil levant Les poissons de chaleur s’envoleront à l’équinoxe d’automne et s’arrêteront à toutes les villes enchantées par les nombres élevés les fractions infinitésimales et les regards des femmes qu’enveloppent les fleuves débordants
Pour moi je demande que le ciel s’en aille avec les nuages avant que je devienne tout à fait imbécile |
© Mélusine 2011 |
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