La revue Dada (sept numéros édités par Tristan Tzara à Zurich puis Paris, 1917-1921) est accessible depuis longtemps en mode image sur le site :
The Dada International Archive, à l'adresse suivante: http://sdrc.lib.uiowa.edu/dada/dada/index.htm

 

Nous offrons à nos lecteurs la possibilité de la lire en mode texte, numéro par numéro. Comme tous les documents du même mode que nous mettons en ligne sur ce site, cette présentation numérique ne saurait remplacer les diverses éditions existantes ou à venir : elle est un complément particulièrement utile pour l’investigation, autorisant notamment toutes les recherches de vocabulaire.

Fait à Paris le 12 juin 2009


Numérisation et mise en ligne : Sophie BEHAR

DADA 1 DADA 2 DADA 3 DADA 4-5 DADA 6 DADA 7  


DADA 2, Décembre 1917

p. 2

NOTE 2 SUR L'ART. H. ARP.

La hauteur chante ce qu'on parle dans la profondeur.
La nature est organisée dans sa totalité, cordages du bateau fabuleux vers le point de rayons, dans les principes qui règlent Les cristaux les insectes en hié r archie comme l'arbre.
Toute chose naturelle garde sa clarté d'organisation, cachée, tirée par des relations qui se groupent comme la famille des lumières lunaires, centre de roue qui tour n erait à l'infini, en sphère, elle noue sa liberté, son existence dernière, absolue, à ces lois innombrables, constructives.
Ma sœur racine, fleur, pierre,
L'organisme est complet dans l'intelligence muette d'une nervure et dans son apparence.
L'homme est sale, il tue les animaux, Les plantes, ses frères, il querelle, il est intelligent, parle trop, ne peut pas dire ce qu'il pense.
Mais l'artiste est un créateur: il sait travailler une forme qui devient organique. Il décide. Il rend l'homme meilleur. Soigne le jardin des intentions, ordonne.
La pureté d'un principe me rend heureux, voir au-delà de l'horizontale qui s'élargit tranquillisant les nouveautés végétales des pays éloignés; floraisons de glace. La verticale : dans la sérieuse pensée devant l'infini en sentant la profondeur d'un instant devant l'animal.

H. Arp

la symétrie
fleur de rencontre à minuit
où le vertige et l'oiseau deviennent tranquillité du halo
et le houblon monte
la fleur devient cristal ou scarabée, aimant, étoile
vouloir mener une vie simple.
Si l'on peut vivre le miracle on a monté la hauteur oit ton sang sera l'ordre des archanges, médicament d'astronomie, lecteur, — croyance amassée clairement dans les -cœurs simples — sagesse connaissance.
TRISTAN TZARA

STRADE
questo andare — sempre questo andare hattere tutte le strade
toccare lutte le contrade

p. 4

crocifiggersi a tutti i crocicchi senza riposare —
non c'è riposo per chi conosce tutte le strade lutte le strade del mondo:
le eliche taciturne degli astri
la follia turbinante delle foglie gialle
i passi di sette leghe del vento la fuga vertiginosa del sangue le vie di tutte le creature salvate o perdute
tanti cammini
tanti destini
di notte a occhi spaventati nell ' alba a occhi purificati la sera a occhi santificati
la vie della bontà
quelle della perversità
quelle dell' amore e del dolore le tortuose vie della sorte
le ermetiche vie della morte tette le linee infinite
che intelaianol’infinito —
andare sempre andare
senza mai riposare
finchè cápiti di tornare
a un angolo di terra toscana
cosi stanchi — da tanto lontano !
che non s'ha forza d'alzare una maso
e allora scavarsi una piccola fossa
e calarsi dentro pian piano
e stendersi e incrociar le mani fissar con occhi trasognati
uma gran pace di stelle sul capo
spengersi in una tenta agonia dolce comc un' avemaria se la dica un' anima pia:
cosi sia —
MARIA D'AREZZO

p. 6

RASOIR MÉCANIQUE

Couchez vous sur le dos et comptez les feuilles des arbres DANS LA FORÊT UNE A UNE
LES JEUNES FILLES ONT PASSÉ
Splendeur des mondes verts unis aux mondes bleus
ii i i i i i i i i i i
Forêts des elephantslionstigresserpentsetjaguars
Vous êtes quelque part
Cependant que je rêve à Clamart
Forêts d'Asie UNE NOISETTE et des deux Ameriques
PIGEON VOLE
AVION VOLE
PLOMB VOLE
Hl HI l-Il HI HI HA HA HA HA HA
Incommensurabilité
De notre éternité
Blancheur et bleuité
MARIE VIENS VOIR
De l'insonorité
Nous irons dans des gares
Et dans des ports
IL EST PASSÉ PAR ICI
LE FURET DES BOIS MESDAMES
IL EST PASSÉ PAR ICI
Eu bateaux cheminsdefer
A travers
Terresetmers
IL VA PLEUVOIR
Pour voir
POUR DADA
AN AN AN AN AN AN AN AN AN AN AN
IIII I I
POUH-POUH POUH-POUH RRRA
sl sl sl

p.8
drrrrr oum oum
AN AN AN AN
aaa aaaa aaa tzinn
UI I I I I I
HA HA HA HA HA HA HA
rrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrr e PIERRE ALBERT-BIROT
COSTELLAZIONE
rosso azzuro
azzuro rosso
su le strade matalliche
del paesaggio-quadro
grafie fluorescenti a descrivere move geometrie che si precipitano verso le tavolozze-pointillistes magnetismo dei muscoli nell' ambientebrivido — ti trasporto
al confine estremo della concezione
(quante decorazioni platina rette su cielo di velluto
— danza tu nel tempovortice il destino le
colorazioni bluastre dell' astratto !
la luna cade sidle costruzioni elettriche
scomposizione chimica stellare della folla --- microcosmi nei pulviscoli di Altair e tu vivi negli spazi dell'enarmonia
quando ridi il bistro degli occhi vela
lo sguardosmeraldo — ridere vivere
ore 23 — la canzone del ritorno con il cuore a sarigue rappreso freddissima — stelle di silenzi per la volta dell' assoluto —
il tutto che esalta l'atomo

stenderti'lasciva su la longue chaise violacea: e molecole apiovere
sul tuo corpo:
avida — sarai ebbra di una fraganza crepuscolare e douerai ‑
— rinuncia alla morte la tua animastro e profondila vivida per il mondo (impallidisce lo scenario orchestra del cielo all' alba divisionista
— nel Colore — ai tuoi piedi languidissima l'estate moritura ti regala le gioiellerie dell' autunno nuovo — accenna l'universo ad un grigiore spirituale
p.10

Tu accarezzi il levriere che ti alita su le mani e sbianchi nel delirio terribile della morfina
GINO CANTARELLI
SENTIMENTS DANS LES PALACES
Atmosphère de palace — girandoles —
agapes de fruits sur les nappes — nickel —
cuir — cuivre- étincellements —
et dans les couloirs kilométriques
les Males.
Hall — coupole — verrières sur la Mer
claire — claire — et les analyses des banquises
du Pôle —
Agonie du soleil vers l'Infini
au delà du promontoire et des naufrages
il a forcé le blocus des sentiments
par sa MORT.
Gens de Palace — gens de Palace — écoutez-moi :
je suis le bon petit avertisseur —
l'observateur — et les cuis-cuis — de votre cœur
je les attends comme sœur Anne d'une tour.
Je suis votre âme-sœur des wagons-lits et je hante
comme vous — comme vous — les thermes et les mers.
Ne courez pas ainsi Voir le soleil MOURIR.
Vous resteriez fixés comme un coléoptère au verre — au verre des verrières circulaires.
La mort - — la mort --- sonnez fanfares à pleine gorge — la mort — mort
çà sent mauvais gens de Palace —
à voir en face —
et je men vais — bouchez vos nez
le nez de vos petits sentiments sur mesure
et de votre irreligion sans avenir —
Finir — Finir —
Futur — Futur —

p. 12

O Palaces éventrés
Limaces mortes — les intestins dehors —
­ et la bare éparse sur les tapis à fleurs
S. DE VAULCHIER

CONCIME
Manti vitali
di putride sonnolenze.
Svolazzare a spirali — terra terra —
come farfalloni chc si disfanno. Sacrifici d'insetti.
Armonia cronometrica
della decoinposizione.
Bollore d'accoppiamenti profondi
come un ronzar febbrile di falene.
Le lune piene — le lune galleggianti
sull' erbe scapigliate
come pallon volanti
su su pel ciclo sono montate —
vuote — senza splendore —
aspergendo di sterile albore
il talamo fremente — di concime bollente.
Il porco ha grugnito
rufolando nel mucchio del concio
come un torvo re preistorico —
un Turno re de' Rutoli — il grugno fitto
nel concio — parlare incomprensibile
scuotendo la brutale — testa sulle male
sorti d'un esercito sconfitto.
E le farfalle si sono spogliate
dell' ali leggendarie — variopinte
nell' aureola de' cieli profondi —
si sono sfarfallate.
La vigna nell' ombria
de' suoi peccati in fiore —
sotto a un fumante tumulo
di concio — vigile stallone —
fiduciosa s'è sdraiata —

p. 14

d' essere fecondata.
Una gallina fradicia — che maturava al sole stcchita e macolata —
ha fatto coccodè
perchè il bambino — che ci si divertiva sull' aia — come con un burattino — per finire la festa
le ha messo un piede sulla testa.
Tutti gli insetti hanno suonato i campanelli alla baldoria — alla baldoria
di Re Concime — vulcano leggendario rinvigorire tic tac — i sonni contadini. Ma la notte era cosi stellata
(o I quella notte stellata
coin' era matematica . . .) che un nero scarabeo passeggero
si credeva uno specchio.
BINO SAN MINIATELLI
2 POÈMES NÈGRES

traduits par Tr. Tzara tribu Loritja

en ouest des nuages végétant
à l'est se répandre fleur se déplia
blanc nuage se déplia
des branches de gui — pissat couler
éclair branches de gui couler arbres ilbara touffus tua
véhée
pleurant immobile
plus large s'étendre feu serrer
feu ayant vu presse feu bois pour le feu charger chouche élargir
éclair

p. 16

frappe casse
eau sur la surface d'argile
où les nuages furent ensemble il rugissa
continuellement
éclair
tonnerre avoir rancune
LA CHANSON DU SERPENT
tribu Loritja
serpentant jeter en avant se tordant jeter en avant peau de serpent se lever au ciel se lever
cœur battre continuellement queue battre continuellement queue veut s'éteindre queue veut remuer
tremblant
PRINTEMPS
à harp
placer l'enfant dans le vase au fond de minuit
et la plaie
une rose des vents avec tes doigts aux belles ongles le tonnerre dans des plumes voir
une eau mauvaise coule des membres de l'antilope
souffrir en bas avez vous trouvé des vaches des oiseaux? la soif le fiel du paon dans la cage
le roi en exil par la clarté du puits se momifie lentement dans le jardin de légumes
semer des sauterelles brisées planter des cœur ; de fourmis le brouillard de sel une lampe tire la queue sur le ciel
les petits éclats de verrerie dans le ventre des cerfs en fuite sur les points des branches noires courtes pour un cri TRISTAN TZARA

p. 17
NOTES
GUILLAUME APOLLINAIRE.

Pour ce poète la vie est un jeu tournant et sérieux de farces, de tristesse, de bonhomie, de naïveté, de modernisme tour à tou r , Le doigt visse dans tous les chairs jusqu'à l'intérieur qui crie et vibr e , où il devient fleur et rit. L'imprévu est l'étoile explosive de partout et la vitesse se marie au conteur tranquille curieux en affirmation naturelle et constante nouveauté. Ce choc enfanta le burlesque. Le passé mis dans une glace reflétante et jetée quelques siècles en avant. Avec la sûreté du cow-boy. La tournure élégante et grotesque. Impulsive capricieuse fine. Au galop au dessus de la vie; l'homme est ridicule.

Le sous-lieutenant Apollinaire grièvement blessé à la tête resta au lit, à l'hôpital; son livre de contes: „Le poète assassiné" {l'Édition) parut en même temps et le poète Croniamantal en redingote dans un berceau rose jaillissait simultanément à Munich dans de diverses caves fréquentées par les princes.

Le théâtre. Puisqu'il reste toujours à une imitation romantique de la vi e , à une fiction illogique, donnons-lui toute la vigueur naturelle qu'il eût premièrement: qu'il soit amusement ou poésie.

Les petites sensibilités torturées dans des psychologies variables, théorie décla m atoire, ne peuvent pas découvrir une Vérité qui restera à jamais obscure, comme toutes les actions qui sont vaines et les résultats: relatifs.

A la manifestation de la revue Sic du 24 juin, Apollinaire fit jouer son drame surréaliste « LES MAMELLES DE TIRËS1AS ». Que les femmes fassent des enfants — leur devoir et leur destination. C'est raisonnable et correct.

Il parait qu'on s'est bien amusé en écoutant ce que Apollinaire racontait si clai r ement dans des décors en lambeaux de journaux et dans des masques qui auraient dû être: la fièvre coupée en marge d'une étoile multicolore et suprême. Le rire : c'est la bonté des hommes.

Chercher des médicaments et la sagesse parmi les chansons et recommençons.

PIERRE REVERDY: LE VOLEUR DE TALA N , roman.

Un livre inattendu, presque le roman qu'on a rêvé. Depuis la Renaissance l'art fut: l'anecdote comme centre, comme principe: c'est - à - dire histoire racontée au richard pour éveiller en lui un « sentiment »; 64% de pitié, le reste: humilité etc., + l'oubli d'un instant incommode où l'on a fait une bonne affaire. La moitié des écrivains sait cela et en profite, l'autre moitié tente encore à chauffer l'actif de l'anecdote pour en faire de l'art — elle spécule sur la courte tradition de quelques siècles. Mais elle sert le même ventre, qu'elle n'a pas désiré ni prévu.

p. 18

La Renaissance fut l'âge infernal du cynique; elle fut pour l'art un bordel; l'anecdote et le charme partagèrent son domaine. L'illusion devint le but, et l'homme voulait surpasser Dieu. Mais les problèmes et la vie mouvementée l'ont fait intéressante et malheureusement, productive.

Nous voulons continuer la tradition de l'art nègre, égyptien, byzantin, gothique, et détruire en nous l'atavique sensibilité qui nous reste de la détestable époque qui suivit le quattrocento.

Le roman de Reverdy est un poème. Les épisodes sont soigneusement emmitouflés dans une substance que nous ne connaissons pas. Le choc des éléments serait autrement brutal. Mais dans l'œuf d'or c'est une vie difficile qui brille. Des lignes droites sortent de cette chair, nous pénètrent et nous y relient. Pour Re verdy l'action transformée en scolopendre avance lentement au-dessous de l'orga nisme (du roman) et cent abeilles nous apportent en petites quantités, par de milliers de piqures invisibles, les résultats et les faits et les introduisent uni formément dans notre sang.

Le voleur de Talan est partout un radiateur de vibrations et les images qui se déchargent dans tous les coins (effet presque électrique à son passage) se réu n issent autour de lui; l'œuvre de Reverdy est par cela COSMIQUE. Mais ce halo ambulant, toujours renouvelé; nous laisse une impression nuageuse, et le goût amer qu'on a en sachant que l'homme est centre et qu'il puisse devenir' dans sons petit monde: un dieu-maître.

Ce que je nomme « cosmique » est une qualité essentielle à un ouvre d'art, Par ce qu'elle implique l'ordre qui est condition nécessaire à la vie de tout organisme. Les éléments multiples, divers et éloignés sont (plus ou moins intensément) con c entrés dans l'œuvre; l'artiste les cueille, les choisit, les range, en fait une construction ou une composition. L'ordre est la représentation d'une unité régie par les facultés universelles, la sobriété, la pureté de la précision.

Il y a deux principes dans le cosmique:

1/donner une importance égale à chaque objet, être, matériel, organisme de l'univers.

2/accentuer l'importance de l'homme, grouper autour de lui et subordonner les êtres, les objets, etc.

Noyau de ce dernier principe est une méthode psychologique; le danger: le be soin de CORRIGER les hommes, mais les laisser a ce qu'ils veulent devenir, — des êtres supérieures. Le poète se laisse traîner au hasard de la successivité et de l'impression, Pour le premier principe, ce besoin prend une nouvelle forme: ranger les hommes à coté des autres éléments, tels qu'ils sont, rendre les hommes MEILLEURS. Travailler en commun anonymement à la grande cathédrale de la vie que nous préparons ; niveler les instincts de l'homme, qui prendraient — en

p. 19

accentuant trop sa personnalité, — des proportions babyloniennes de méchanceté et de cynisme.

Reverdy en groupant autour de l'homme les respirations, les relations des éléments, crée tics états presque matériels qui restent stagnants tout le long du trajet des différents personnages, et l'on étouffe presque, vers la fin du livre dans cette atmosphère dont on connait les secrets de la composition, si l'on a assisté attentivement aux étapes qu'on a parcouru. C'est une grande qualité de ce roman de nous donner une émotion tellement forte, avec la sobriété dans le choix des moyens, que Reverdy y applique; en cela il est honnête et sérieux. Il se rap proche du premier principe en ne faisant pas de morale, car il laisse tous les autres éléments (sauf l'homme) se manifester simultanément. Reverdy oppose à l'art pour l'art: l'art pour la vie. Nous y opposons l'art pour la diversité cosm ique , pour la totalité, pour l'univers, et voulons voir, innées dans celles-ci, la vie lente qui existe et dort même dans ce qu'on nomme d'habitude mort. Mais Ies théories, les formules, sont relatives et élastiques (prises comme absolues elles deviendraient dogmes étroits et fanatisme) et nous ne voulons point en faire; voir dans ce que nous avons dit l'esquisse de quelpues earactéristiques. Il faut lire le roman de Reverdy, dont la poésie est sage et calme, et témoigne d'une tranquillité qui pousse et s'accumule dans sa propre puissance. Cascade qui tomberait en haut en incendie productif comme un grand arbre aux fruits multiples et divers.

PIERRE ALBERT-BIROT: TRENTE ET UN POÈMES DE POCHE (E d , Sic) Colliers déréglés des maisonssapinsverts; claque notation dans une boite: une atmosphère dans une boite d'allumettes et la vitesse captée — des insectes, des tramways qui grimpeut vers une tête de verre . Dire: le futurisme pour les jeunes filles , l'explosion au pensionnat et aplatis sous les coussins douillets: les paysages nouveaux? Mais chaque petite page crie trop fort et crève dans le vase, chacune contient une nouvelle idée, et l'on est astralement émerveillé devant le passage rapide (un peu trop brutal , mais peut-être: nécessaire?) des images de vie intense et coloriée.

H. ARP, W . HELBIG ET A. SEGAL exposent actuellement une série de peintures et de broderies à la galerie Wolfsberg (Zurich) . Le peintre roumain Segal veut donner à chaque élément une valeur égale et le droit à une vie indépendante. Il voit dans l'application de cette pensée aux principes humains, l'équilibre et la tranquillité. Ses toiles sont illuminées par ces deux grandes qualités et témoi gnent d'une sensibilité riche et d'un bon métier.

Reverdy en groupant autour de l'homme les respirations, les relations des éléments, crée tics états presque matérielsi qui restent stagnants tout le long du trajet des différents personnages, et l'on étouffe presque, vers la fin du livre dans cette athmosphére dont on connait les secrets de la composition, si l'on a assisté attentivement aux étapes qu'on a parcouru. C'est une grande qualité de ce roman de nous donner une émotion tellement forte, avec la sobriété dans le choix des moyens, que Reverdy y applique; en cela il est honnête et sérieux. 11 se ra­ proche du premier principe en ne faissant pas de morale, car il laisse tous les autres éléments (sauf l'homme) se manifester simullanément. Reverdy oppose à l'art pour l'art: l'art pour la vie. Nous y opposons l'art pour la diversité cos­ mique , pour la totalité, pour l'univers, et voulons voir, innées dans celles-ci, la vie lente qui existe et dort même dans ce qu'on nomme d'habitude mort. Mais Ies théories, les formules, sont relatives et élastiques (prises comme absolues elles deviendraient dogmes étroits et fanatisme) et nous ne voulons point en faire; voir dans ce que nous avons dit l'esquisse de quelpues earactéristiques. Il faut lire le roman de Reverdy, dont la poésie est sage et calme, et témoigne d'une tranquillité qui pousse et s'accumule dans sa propre puissance. Cascade qui tomberait en haut en incendie productif comme un grand arbre aux fruits multiples et divers.

PIERRE ALBERT-BIROT: TRENTE ET UN POÈMES DE POCHE (E d , Sic) Colliers déréglés des maisonssapinsverts; claque notation dans une boite: une atmosphère dans une boite d'allumettes et la vitesse captée — des insectes, des tramways qui grimpeut vers une tête de verre . Dire: le futurisme pour les jeunes filles , l'explosion au pensionnat et aplatis sous les coussins douillets: les paysages nouveaux? Mais chaque petite page crie trop fort et crève dans le vase, chacune contient une nouvelle idée, et l'on est astralement émerveillé devant le passage rapide (un peu trop brutal , mais peut-être: nécessaire?) des images de vie intense et coloriée.

H. ARP, W . HELBIG ET A. SEGAL exposent actuellement une série de peintures et de broderies à la galerie Wolfsberg (Zurich) . Le peintre roumain Segal veut donner à chaque élément une valeur égale et le droit à une vie indépendante. Il voit dans l'application de cette pensée aux principes humains, l'équilibre et la tranquillité. Ses toiles sont illuminées par ces deux grandes qualités et témoi ­gnent d'une sensibilité riche et d'un bon métier.

p. 20

LEONHARD FRANK, fera paraître chez Rascher & Co., Zurich, un recueuil de nouvelles écrites pendant la guerre. Ce livre plein de bonté et de tempérament émouvera déjà par la hardiesse de son titre: « L'homme est bon », affirmation qui pour Frank n'est pas une ironie, mais une forte conviction se rapportant au fond primitif de l'âme qui ne serait pas empoisonnée par l'éducation et par les conditions sociales présentes. Propager ce livre révolutionnaire d'un de nos meilleurs prosateurs d'aujourd'hui, qui éfface par ses qualités intenses les frontières des groupements exclusifs et des doctrinalismes étroits.

SIC, revue d'avant-garde, courageusement dirigée par P. A. Birot. Le dernier no. contient : un poème de Cantarelli; .,Les mamelles de Tirésias" musique de Germaine Birot; un poème de Birot; un bois trop mécaniquement sommaire, de Pr ampolini ; un beau poème d'un lyrisme cosmique de P. Drieu la Rochelle; un poème de Ary Justmann : une note sur l'art nègre et un poème de Tr . Tzara.

LE PAGINE — Sympathique et sérieuse petite revue, parait depuis 2 années à Naples sous les soins de N. Moscardelli et de M. d'Arezzo , poètes de grand talent qui gardent une attitude cligne et silencieuse.

NOI, revue internationale, paraît à Rome sous la direction de Prampolini et de San Miniatelli. Une des dernières peintures de Severini, reproduite dans le n°. est très intéressante par la construction des plans bien équilibrés . Des bois de Arp, Galante, Janco, Prampolini, poèmes de Buzzi, Meriano, Bino et un poème (horrib­ lement déformé par les erreurs typographiques) de Tzara. La revue nous paraît sérieuse.

PROCELLARIA (dirigée par Cantarelli et Fozzi) sembla afficher sur son programme l'antisyntaxisme des paroles en liberté, c'est-à-dire le désordre des éléments et le combat contre les valeurs existantes et éternelles, — mené parfois vers un désir trop visiblement imitatif: mélange inorganique de la peinture de la musique et du lyrisme … académie et scientifisme dont les bases sont très ésotériques et fluides. L'instabilité est trop évidente, hélas, et l'art n'est pas une science. Dans son dernier numéro (3) Procellaria semble se demander à propos des paroles en liberté: c'est l'esprit qui y est nouveau ou l'éternel romantisme prend de nou velles formes? Mais les recherches sont toujours intéressantes.

LE PEINTRE M. JANCO fera au mois de février 2 conférences sur l'art nouveau, à l'école supérieure d'architecture de Zurich.
Le bois sur la première page de la couverture est de Mlle. H. DE REBAY.

p. 21

« LA FÉTIDE REVUE DEMAIN »…« rédigée par une jeune traître du nom de Henri Guibeaux » … commence à avouer, c'est vrai, humblement, sur la dernière page de la couverture, ses mauvaises habitudes de fréquenter les eaux malpropres. Mieux vaut tard que jamais.

Mais pourquoi des malhonnêtteés? Ce monsieur n'a jamais reçu aucune sorte de recommandation du « directeur » de notre publication (Tr. Tzara).

Le même mr. ignore à quel degré il est détesté par les vrais démocrates qui considèrent ses actions comme égales à celles rendues par des agents payés. Mr. G. injurie en outre, furieusement, les simultanéistes cubistes, mais fut tout ­ de-même content de pouvoir s'intituler « dynamiste » dans la revue « simultanéiste » POÈME ET DRAME qui publia une poésie de lui à coté de celles de Marinetti, Apollinaire. Barzun.

Hélas! L'honnêteté des journalistes et la sagesse des dilétants!...
L'administration du Mouvement Dada a organisé un service de librairie. Adresser les commandes au: Mouvement Dada, Administration : F. Arp, Zurich , Zeitweg 83.

LES CAHIERS DADA paraissent sous la direction de Tristan Tzara.
Par une erreur typographique la note sur F. Glauser dans Dada I ne parut pas en entier. Nous la complétons. F. Glauser: « poète » (sentimental) n'a rien de commun avec le mouvement Dada. Il fut pourtant toujours parmi nous et colla ­ bora activement à nos soirées. Certains rats qui commentent des vers de jeu ­ nesse de cet écrivain en lui donnant l'épithète cité plus haut se trompent sur une question de qualité. Nous continuerons à apprécier cet écrivain. »

LIVRES:

PIERRE REVERDY: LE VOLEUR DE TALAN, roman, chez l'auteur 12, rue Cortot, Paris.
PAUL DERMÉE: SPIRALES, poèmes.
ENRICO SETTIMELLI: MASCHERATE FUTURISTE (Ed. Italia Futurista, Firenze) HARUKICHI SHIMOI-GHERARDO MARONE: POESIE GIAPPONESI (Ed. R. Ricciardi, Napoli)
BINO: VALLIBELLA (Ed. B. Lux, Roma)
GINO CANTARELLI: ASCENDENZE CROMATICHE (L. 2.50)
RAFFAELLO FRANCHI : RUSCELLANTE (Fir enze L. I. —)
Incantamento (Tempra L. 1. __ )
PAOLO ARGIRA : CARLO LINATI (Ed. La Diana L. —.75)
NICOLA MOSCARDELLI: GIOIELLERIA NOTTURNA (Va paraître)

p. 22

MOUVEMENT DADA
ADMINISTRATION: F. ARP, ZURICH, ZELTWEG 83.
Pour paraître en janvier 1918:
12 POÈMES DE TRISTAN TZARA
6 DESSINS DE H. ARP
Prix: 2 Frs. 20 Exemplaires signés numérotés de 1 à 20 et coloriés à la main: 15 Frs.
DADA I. Sommaire : H. Arp — Broderie, bois 1 et 2; Tr. Tzara — Note sur l'art, poèmes nègres, vers ; O. Lüthy - - Madonna: F. Meriano — Walk ; N. Mos c ardelli — Piume; M. Janco — Relief, construction, bois: A. Savinio — Un vomissement musical.
Notes: Laban; La poésie simultanée; H. Guilbeaux; Livres et revues etc. Prix : 2 Frs. Edition de luxe: 8 Frs,
R. HUELSENBECK : PHANTASTISCHE GEBETE, Bois de H. Arp. 3 Frs.
M. JANCO: ALBUM, 8 Gravures sur bois avec un poème de Tr. Tzara. 75 Frs.
TR. TZARA: LA PREMIÈRE AVENTURE CÉLESTE DE MR. ANTIPYRINE, avec des bois coloriés de M. Janco. 2 Frs.
10 Exemplaires sur Hollande, numérotés de 1 à 10 et coloriés à la main : 10 Frs.

DADA 1 DADA 2 DADA 3 DADA 4-5 DADA 6 DADA 7  

[Haut de la page]

©2009 Mélusine
Accueil du site